Notre saison "russe" se termine et nous avons le plaisir de vous faire partager les lectures qui nous ont marquées cette année.
Quand nous disons "russe", il s'agit d'auteurs de langue russe, provenant de différentes républiques ex-soviétiques, ou bien exilés. Ainsi Andreï Kourkov est ukrainien, Svetlana Alexievitch biélorusse, Gouzel Iakhina originaire de Tartarie... et Andreï Makine membre de l'académie française !
Comme d'habitude, ces lectures nous font voyager, découvrir de l'intérieur un pays avec son histoire, sa culture, ses mentalités, ses problématiques... A chaque fois nous sommes dépaysées mais nous en sortons enrichies dans notre façon d'appréhender le monde.
On vous souhaite le même voyage de lecture.
Ce roman se présente sous la forme d'un scénario de film proposé à un concours en 1988. Il a été publié et traduit en 2021.
Moscou 1939, un biologiste vient présenter une souche de la peste à Moscou. Il se trouve qu'il a été malencontreusement contaminé. Le NKVD - service d'état - déploie un plan très efficace de quarantaine.
On assiste à la réaction des différents personnages contaminés qui sont facilement (1939 c'est l'année des grandes Purges staliniennes) recherchés et mis en quarantaine.
Astrid
1920. Période d’effroyable famine dans la région de la Volga. Par milliers, des enfants, orphelins, errent en quête d’une nourriture introuvable.
Ici commence l’histoire d’un premier convoi de 500 enfants, organisé tant bien que mal, pour les amener à temps jusqu’à Samarcande où il pourront être alimentés pendant l’hiver. Faim, soif, choléra… accompagnent ce long voyage à travers l’Asie Centrale.
« Même dans cette époque broyeuse d’hommes, on veut être des humains » dit Deïv le débrouillard et courageux chef de convoi. Avec Blanche l’intraitable commissaire politique, Bourg l’infirmier, les « nurses » improvisées et d’autres rencontres de hasard, de beaux personnages donnent respiration à un récit d’une densité rare.
Comme toujours, Gouzel Iakhina s’appuie sur des faits historiques. Elle en fait un roman éprouvant, hallucinant mais pétri d’humanité.
« Une épopée extraordinaire sous la plume d’une magicienne » dit la critique. Tout à fait d’accord.
Aleth
C’est un livre court qui raconte une touchante histoire d'amour.
Elle est jeune et belle. Son mari est à la guerre. Elle vit chez sa belle famille et travaille comme un homme.
Lui est saisonnier, de passage, blessé à la guerre, libéré ou déserteur ? Un monde les sépare. Ils travaillent ensemble ne se parlent pas et lui s'exprime par le chant.
L'histoire est racontée par un adolescent qui lui aussi découvre l'amour.
La fin ? Il faudra le lire...
Josiane
L’auteur de ce roman policier est elle-même lieutenant-colonel de la Milice de Moscou, diplômée de criminologie. Elle met en scène Anastasia Karmenskaïa, officier de police à Moscou qui va diriger cette enquête.
Peu nombreuses en 1999 dans une brigade criminelle, elle va être invitée dans une émission télévisée consacrée aux femmes ayant un métier extraordinaire. Anastasia y invite son amie Tatiana, juge d’instruction, à témoigner avec elle. Or à la fin de l’émission où elles ont eu un grand succès, une pancarte surgit dans la foule des participants : " Puisque tu es si intelligente, devine où tu vas rencontrer la mort ? ". Anastasia lance son enquête qui va la conduire dans les bas-fonds et le monde des sans-abris. Elle va découvrir aussi la vie difficile des moscovites qui, tout en travaillant, ont un pouvoir d’achat très restreint.
J’ai été passionnée par ce livre très bien construit où chaque chapitre a pour titre un personnage différent qui nous donne sa version des faits. Mais les victimes s’accumulent… Anastasia va-t-elle trouver le coupable avant la 7ème victime, mettant elle-même sa vie en danger ?
Un livre que l’on ne lâche pas avant la fin.
Marguerite
C’est avec stylo et magnétophone que travaille cette auteure biélorusse, prix Nobel de littérature. Ses livres sont toujours un évènement (les cercueils de Zinc, la supplication…) et nous bouleversent.
Avec cette « Fin de l’homme rouge », elle traque ce qui a fait la vie de l’homo sovieticus, ce qui a été défait après la chute de l’URSS. Elle recueille « brin par brin, miette par miette » les mots, les paroles à hauteur de vies quotidiennes. Elle s’inclut dans ces gens qu’elle fait parler à partir de questions simples. « Nous sommes voisins de mémoire » écrit-elle ; « C’était le socialisme, et c’était notre vie… ».
Chapitres courts, aucune complaisance, dureté des témoignages des témoins d’une époque, « qui n’ont pas été capables d’être heureux autrement ».
Si vous n’avez pas le courage d’aller jusqu’au bout, au moins lisez et relisez l’introduction ! Cela donne vraiment à réfléchir.
Aleth
Kostia rentre de la guerre de Tchétchénie le visage dévasté. La vodka, mais aussi l’amitié qui le lie aux survivants de la destruction de leur tank l’aident à survivre.
Sans chapitres, sans coupures comme s’il n’était guidé que par les digressions de la pensée de Kostia un petit livre terrible et tendre, réaliste et poétique, amer et sensible. Merveilleux.
Nicole
Tchernobyl, chronique du monde après l’apocalypse. Après la catastrophe de Tchernobyl Svetlana Alexievitch donne la parole aux témoins, objectivement, sans favoriser une opinion plutôt qu’une autre. Rien n’est laissé de côté, ni les mensonges du pouvoir, ni l’incompétence, ni l’inconscience des survivants.
C’est un texte magnifique, déchirant, inoubliable, presque insoutenable par moments, mais qu’il faut absolument avoir lu.
Nicole
Une belle histoire d'amitié.
La découverte pour le narrateur, d'une autre culture, d'une autre façon de voir le monde.
Le narrateur, d'origine russe, évoque la vie, les combats et le destin à la fois tragique et extraordinaire d'Elias ALMEIDA, jeune révolutionnaire angolais, dont il partagea la même cellule d'une prison angolaise.
Elias mettra toute son énergie au service de la révolution. Parti se former aux idées révolutionnaires à Cuba, il y rencontrera Ernesto Guevara (dit El Che). Déçu, il s'enfuira en ex Union Soviétique pour y poursuivre sa formation. Mais il y subira le racisme et la manipulation et il connaîtra le cynisme de la politique soviétique dans l'Afrique de la guerre froide. Il y vivra aussi un amour d'une grande intensité avec Anna, une étudiante moscovite.
Dans ce roman, les images sont fortes et violentes, montrant une Afrique dans la tourmente. Mais il y a également de très belles pages sur la force de l'amour.
Françoise
Une traque humaine dans la taïga.
Une dernière phrase de toute beauté.
A lire jusqu’au bout.
Aleth
Un écrivain ukrainien raté qui adopte un pingouin, ce n'est pas banal.
Cet écrivain raté, qui, pour gagner sa vie, accepte d'écrire des nécrologies dans un journal, ce n'est pas banal non plus.
Secrets, intrigues, disparitions : Andreï Kourkov plonge le lecteur dans le monde dangereux de groupes louches et violents.
Avec une bonne dose de loufoquerie, d'ironie et d'absurde, Andreï Kourkov nous dépeint une société post-soviétique très corrompue.
Brigitte
En 2017, dans le Donbass.
Sergueï et Pachka vivent en zone grise dans un village abandonné par le reste de la population.
Bien qu'ils soient ennemis depuis l'enfance ils se soutiennent pour lutter contre l'angoisse et la solitude.
Sergueï emmène ses chères abeilles en Crimée mais là aussi le gouvernement russe veille.
Un livre sur les hommes qui aimeraient ne plus subir la guerre et vivre tout simplement en paix.
Michèle
Vous allez apprécier ce livre miniature dont la lecture rapide et intense vous transportera en un éclair dans la rationalité et l’absurdité du comportement humain.
Style concis, clair, satyrique. A lire et à relire bien évidemment !
Aude
Février 1919, les Bolcheviques prennent le pouvoir à Kiev.
Anarchistes, indépendantistes, armée blanche s'affrontent.
L'étudiant Samson s'enrôle dans la milice pour survivre. Il enquête sur différents trafics avec l'aide de son oreille tranchée par le sabre d'un cosaque...
Roman policier historique qui montre avec humour le comportement absurde des hommes.
Kourkov pose un regard tendre sur ses personnages.
Michèle
J'ai été complètement emportée par le roman dès les premières lignes. Pour moi c'est un OLI (œuvre littéraire incontournable). J'ai découvert sa lecture au ¾ de notre année " Auteurs Russes " après avoir lu des romans plus contemporains et plus ancrés dans le vécu géographique et quotidien des russes.
Ecrit en 1920 alors que l'auteur avait dû s'exiler, c'est un roman visionnaire qui dénonce les ravages d'un état totalitaire sur l'individu.
Le roman est écrit sous forme de journal par D-503 le mathématicien concepteur de l'Intégrale qui doit conquérir d'autres planètes pour les soumettre à la volonté du Bienfaiteur. Cet ingénieur est travailleur et heureux dans une société qui règle tout, surveille tout un chacun dans une immense cité de verre. Le livre raconte l'évolution de D-503 vers un éveil et une prise de conscience inspirée par la passion qu'il porte à une femme I-330 qui l'initie à des sensations interdites.
L'écriture varie au fur et à mesure de l'évolution du personnage. Dans la deuxième partie l'écriture devient chaotique, saccadée, agitée, confuse pas toujours facile à lire.
Assurément c'est un livre que je relirai tant son contenu est riche. On peut en faire la lecture sous différents angles, littéraire et poétique, politique, scientifique, philosophique.
Vous avez compris, je vous invite à le lire, vous ne pourrez pas y être indifférent !
Astrid
Dans la Russie post-communiste ; une plongée dans l'immensité sibérienne.
Entre braconnage et vent de révolte, entre liberté et asservissement.
Une sensation de calme et d'éternité sur les rivages de la mer d'Okhotsk
Réjane
Dans deux villes de taille moyenne loin de Moscou, deux femmes quarantenaires s'expriment via le réseau social Twitter.
Elles nous livrent une partie de leur quotidien difficile, et aussi de leurs envies et de leurs espérances : retrouver un mari, avoir une vie plus confortable avec quelques loisirs... Elles nous livrent également leurs opinions, très divergentes et opposées, sur l'actualité et la guerre.
Ce récit actuel, vivant et vif est un témoignage éclairant sur la population russe d'aujourd'hui.
Brigitte